Archives par mot-clé : Perec

Composition

Pour ne pas oublier tout ce qu’on oublie toujours, toujours un peu trop vite

L’être humain se compose assez largement d’eau. La sauce ravigote se compose classiquement d’une vinaigrette augmentée d’herbes fraiches, câpres et cornichons. La petite musique de nuit, composée par Mozart. Le mot composition comporte plusieurs sens, action de former un tout par assemblage, combinaison, mélange, à décliner suivant les domaines concernés, chimie, technologie, mathématiques, enseignement ou beaux-arts, entre autres. Composition s’accorde surtout avec questions, ces questions qu’on se pose, et qui suivant les cas nous empêchent de dormir, nous permettent de dormir, de faire avancer le monde, parfois celui de tous, plus souvent juste le nôtre. Dans nos vies vient et revient, le besoin de se pencher sur la composition, attrapé, rattrapé par les questions de base, qu’est ce qu’il y a dedans, qu’est-ce que je vais mettre dedans. Question de ce qui est et de ce qui sera. Qu’est-ce qu’il y a dedans, c’est la curiosité, l’analyse nécessaire, le besoin de savoir, qui orientera peut-être les décisions à venir pour savoir quoi grader, quoi laisser dans le cadre, quoi au contraire exclure, omettre avec conscience tout ce qu’on veut omettre. Occulter tout l’humain quand on veut faire nature en rêvant secrètement de même faire oublier que quand il y a photo, il y a photographe, quand il y a écriture, il y a qui écrit. Choisir ce qui pourra attirer l’œil timide ou prompt à s’évader, du plus clair ou du sombre, des lignes géométriques, des contrastes, des couleurs, des constructions classiques, suspens et coup de théâtre. Ou justement centrer sur la foule, sur les gens au point de même masquer ce qu’ils sont venus voir, admirer, découvrir. Pour ça décomposer, regarder en détail chacun des éléments, puis estimer leur poids dans la composition, éviter de son mieux les exagérations, les bords coupés trop courts ou bien coupés trop larges et puis s’interroger, quoi au centre, quoi au tiers, quoi dans l’œil de la spirale. Et puis recomposer, un livre tout nouveau fabriqué comme un puzzle, à partir de ce qu’on trouve en explorant le monde par décomposition, puis recomposition, avec ses règles à soi, comme la vie mode d’emploi

Perspective

Pour ne pas oublier tout ce qu’on oublie toujours, toujours un peu trop vite

Les perspectives d’avenir épargnées par le sombre sont de loin les plus rares. Plus souvent sur le monde est cette soif comme un gouffre de toujours faire combat, ces belliquosités qu’on peine tant à soigner. Perspective en dents de scie, ligne trop souvent brisée. Les perspectives d’espaces sont elles universelles, celles qui nous parlent tout bas de ces espèces d’espaces qu’on croit pourtant connaître, mais qui à chaque regard se dérobent et basculent, se griment et se transforment au moindre pas de côté qui déplace notre œil. Géométrie, dessin, plan en bleu très sérieux, projection et points de fuite, travail en perspective pour que tout soit exact. Retour aux règles de base, aux principes fondateurs qui nous donnent les clés pour faire de notre monde une copie aplanie, aplatie, compressée, repliée sur elle-même, pour essayer de dire cette dimension perdue. Oui, mais plier comment, les arêtes, les rondeurs, le choix sera décisif. Perspective cavalière, linéaire, centrale, conique, cylindrique, aérienne, isométrique, curviligne… Les possibilités abondent, alors choisir la bonne, celle qui convient le mieux de qui voudra l’écrire à qui voudra la lire. L’idée est de se comprendre, émettre le message, dire ce que les yeux ont vu de sorte que d’autres yeux puissent voir la même chose sans devoir se plier ni au lieu ni au temps. Ma perspective à moi fera exister l’objet, mais suivant mon point de vue, mes importances à moi. L’idée sera d’avoir un langage en commun pour vous la raconter. Savoir que les choses plus loin n’en seront que plus petites et plus pâles et plus fines. Oui, mais savoir aussi que la cime du sapin n’est pas seulement plus fine parce qu’elle est loin en haut, mais aussi car le tronc va en s’amincissant, évidence flagrante lorsque l’arbre est à terre, baleine des forêts aux côtes comme des branches, innombrables bras en croix. Trompeuses et pas si simples toutes ces perspectives-là, la vie sans mode d’emploi. Alors, continuer à écrire et écrire même si les premiers mots tout comme les derniers nous paraissent si loin qu’on s’en souvient à peine, qu’on les pressent à peine. Reste la belle perspective d’avancer dans le livre

Espace vert

Pour ne pas oublier tout ce qu’on oublie toujours, toujours un peu trop vite

Elle est rose, un peu mauve, dans un espace tout vert. Tout autour d’elle, des herbes, des tiges, des feuilles, des herbettes, du chiendent et du trèfle, mais aussi des orties, des ronces et de l’ivraie. En résumé, beaucoup de ces nombreuses plantes vertes qu’on appelle mauvaises herbes. Mais elle, elle est rose. Rose avec un peu de violet, du blanc et du vert, quand même, pour ses feuilles longues et fines. Mais surtout elle, elle a une gueule d’ange. Elle attire l’objectif des photographes des près. Grandes ailes déployées, deux yeux bruns et terribles qui te parlent juste à toi et même rien qu’à toi et une longue robe tachetée qui en fait un bijou, une star au sein des fleurs. L’orchidée. Au milieu de toutes les fleurs, l’orchidée est de celle que l’on admire le plus. Ses formes et ses couleurs, son inventivité, son maquillage d’insecte pour piéger les insectes, et sa ténacité pour revenir chaque année avec d’autres comme elle, chaque printemps de nouveau plus belle et plus pimpante, elle est haut sur la liste de nos fleurs préférées. Mais elle ne viendra là que si on ne la tond pas. Pas d’orchidée lovée au coin d’un stade de foot ou d’un gazon de parterre. Il faudrait pour cela éviter soigneusement de lui couper l’herbe sous le pied, il faudrait inventer une autre alternative pour faire du vert en ville, une autre espèce d’espace, pas uniquement vert. S’asseoir un jour d’été au milieu des feuilles vertes avec une feuille blanche et penser le dehors avec tous nos dedans remplis de connaissances, d’envies et de besoins. Partir de cette feuille blanche comme l’a fait Georges Perec et puis s’en éloigner, la voir dans une prairie pas seulement dans une chambre, et puis des arbres autour, une forêt comme immeuble, des ruisseaux, des vallons qui diraient la région et puis vu de plus haut on serait sur un nuage à l’échelle du pays, du continent, de la Terre et puis du grand espace. Juste réécrire l’histoire, avec du vert en plus, avec en plus les fleurs et pas juste leurs feuilles, une espèce d’espace vert qui ferait place à la vie, au-delà de la ville

20230916

"De temps en temps", ça commence par la météo, et ça continue avec ce qui vient en tirant sur le fil

Temps de Sud. En Sud-Isère et en bordure des Hautes-Alpes : temps très nuageux, hauts sommets souvent accrochés avec de fréquentes averses. Ailleurs : alternance de périodes ensoleillées et de passages nuageux élevés pouvant donner de brèves averses (très rares sous le foehn en Tarentaise, Vanoise, Beaufortain, Val d’Arly ..)
Températures minimales comprises entre +14 et +16 degrés.
Températures maximales comprises entre +24 et +27 degrés.
Isotherme 0° vers 3800 mètres.
Vent modéré de Sud, foehn parfois sensible.
Prévisions Météo Alpes

Un temps de sud. Couleurs chaudes, au matin comme au soir, on dirait le sud. On dirait le sud, le temps dure longtemps et la vie sûrement plus d’un million d’années. Le temps dure longtemps, le temps du refrain, le temps de répéter, de prendre le temps de redire. Une chanson, un refrain qui revient, s’installe dans nos mémoires qu’on le désire ou non, à force d’incessant. Une répétition des mots, dits, puis redits, encore. Pour insister, pour rythmer pour être sûr que ça reste, que celui qui écoute garde au moins ça de l’histoire. Et jouer sur ce rythme, comme la baguette qui frappe la caisse claire en cadence, le marteau sur le clou. Parce que le rythme aide à loger dans la tête, à faire revivre les mots par la musique des mots. Il est des textes où la répétition n’a plus rien de choquant, où elle est même admise, permise et bienvenue. Mais pas dans tous les textes. Manuel du roman, de l’article, de l’essai, chasser la redondance, la traquer, l’abolir. Pourtant il est souvent des mots qui se perdront dedans leur synonyme, costume mal ajusté trop grand ou trop petit ou d’une pâle couleur bien loin du chatoyant qui faisait tout le charme du mot de l’origine. Un goût d’édulcorant quand on apprécie tant la saveur du souvenir, la si goûteuse madeleine. Alors vive le retour, le construit bégaiement, comme un je me souviens qui nous ramène toujours au début de chaque phrase dans l’infini d’avant, comme une respiration qu’on rêverait sans fin

20230827

"De temps en temps", ça commence par la météo, et ça continue avec ce qui vient en tirant sur le fil

Perturbé. Ciel souvent bouché avec une succession de passages pluvieux, temporairement orageux, tout au long de la journée et de la nuit suivante. Le cumul de précipitations s’annonce par endroits important (Belledonne/Oisans notamment) avec un copieux arrosage à la clef.
Limite pluie-neige vers 3200 puis 2900 mètres voire 2700 mètres en nuit suivante.
Températures minimales comprises entre +14 et +16 degrés.
Températures maximales comprises entre +19 et +22 degrés.
Isotherme 0° vers 3600 puis 3200 mètres.
Vent faible à modéré de Sud-Ouest puis Nord-Ouest.
Prévisions Météo Alpes

Perturbé, pluie, ciel bouché. Arrivée de l’automne et départ de l’été. Redouté, attendu, le temps serait venu, du départ de ceci, du retour de cela et du grand chassé-croisé de la fin des vacances. Retour au plus intime des vallées de montagne, descendre des sommets qui pensent déjà au blanc ou comment le grand monde agit sur le petit, les temps et les espaces, emmêlés, embrouillés, sans vraiment qu’on sache dire si ceci ou cela entraîne cet effet-là ou cette conséquence-ci. Retour aux sources aussi pour nos oreilles fourbues, revenir au silence, au goutte à goutte du lent après le grand tumulte des rires et de tous leurs éclats. On redécouvre un monde qui était juste là, en regardant moins loin, en regardant plus près et d’un œil différent, le bourgeon déjà prêt pour le printemps suivant quand la feuille fait automne, se brunit et se tache. Les nuages nous ramènent à penser plus petit, à changer de focale du grand angle au macro. De la forêt aux arbres, des feuilles à leurs nervures, repenser au plus près, au détail, au précis. Changer de curiosité. De l’espace au pays, à la ville, à l’immeuble puis à l’appartement, à la table de travail et aux papiers posés, comme une espèce d’espace qu’on lirait à l’envers

20230709

"De temps en temps", ça commence par la météo, et ça continue avec ce qui vient en tirant sur le fil

Fortes chaleurs. Temps très ensoleillé, rares cumulus proche des Hautes-Alpes en après-midi. La chaleur monte d’un cran.
Températures minimales comprises entre +16 et +19 degrés.
Températures maximales comprises entre +33 et +36 degrés.
Isotherme 0° vers 4400 mètres.
Vent faible à modéré de Sud-Ouest.
Prévisions Météo Alpes

Fortes chaleurs. Ces chaleurs qu’on recherche dans le froid de l’hiver, ces chaleurs qu’on redoute dans le chaud de l’été. Dégoût pour les extrêmes, répugnance, réserve bien marquée. Nous ne sommes pas faits pour ça, animaux comme les autres, faits pour le tempéré, mieux dans le modéré, l’alternance, le dialogue. Entre clim et chauffage nous avons inventé de quoi nous dorloter, quelles que soient pour demain les tragédies à venir. Et pourtant il en est parmi les êtres humains pour tester les endroits où il fait vraiment froid, s’installer sur les glaces, traverser les déserts et s’adapter aux pires, comme beaucoup d’entre nous qui aiment de temps à autre se pencher sur le bord et regarder au-delà des limites installées de nos douillets conforts, essayer et tenter ou expérimenter, quitte à roussir un peu nos ailes de papier, écrire un livre sans « e » pour la beauté du txt

20221026

"De temps en temps", ça commence par la météo, et ça continue avec ce qui vient en tirant sur le fil

Peu nuageux. En dehors d’anecdotiques grisailles côté Isère au réveil, le temps est très ensoleillé jusqu’en milieu d’après-midi. En fin de journée on retrouve des nuages élevés qui arrivent par le Sud-Ouest et tamisent l’éclat du soleil sur une bonne partie de la région.
Températures minimales comprises entre +11 et +13 degrés.
Températures maximales comprises entre +21 et +24 degrés.
Isotherme 0° vers 3500 mètres.
Vent modéré d’Ouest-Sud-Ouest.
Prévisions Météo Alpes

D’anecdotiques grisailles. Des anecdotes, des grisailles, des bouts de nuages, des lumières et des ombres. Des détails, des petites choses, des fragments, des motifs qui passent et dont on se saisit, qu’on garde, qu’on stocke et qu’on utilisera pour construire autre chose. Un œil ici, un regard là, ailleurs une attitude. Une main qui se pose, la courbe d’un bras, les carreaux d’une chemise remontée sur les avant-bras, toujours un peu plus haut côté droit que côté gauche. Le côté qui écrit, qui tient le couteau et qui tourne la clé dans la serrure et ouvre la porte. Pour l’intérieur aussi, piocher à droite et à gauche. Une obsession, une contradiction, un mot qui revient tout le temps, une pointe d’accent, un « o » un peu plus grave, un mot qu’on utilise plutôt ailleurs qu’ici, entre wassingue et chocolatine. Une relation au dehors aussi, un besoin de grand air, une soif de couleurs, une façon de répondre à l’appel du téléphone. Et puis on prendra peut-être aussi un peu de soi, pour compléter. Penser/Classer. Ensuite, lier, lisser, rendre homogène et cohérent, élargir, rétrécir, changer l’échelle de l’espace. Y mettre du temps, beaucoup de temps, laisser frémir et réécrire. Il faudra bien tout ça et peut-être bien plus, pour enfin pouvoir faire un bout de texte qui soit une éclaircie dans le ciel de nos pages