Journal hebdomadaire de la nature autour, promenade, branche dessus, branche dessous, avec le grand dehors

Semaine à nuages, semaine de nuages, semaine des nuages. Pas de grands cieux bleus, pas non plus de grands déluges. Une semaine entière à regarder les nuages, tous les étages de nuages, les fins filaments pâles, fils de coton si fins qu’il faut bien qu’ils s’assemblent pour qu’on puisse les repérer, tout là-haut, tout en haut. À l’étage du milieu, coton, chou-fleur, courbes et courbures, rondeur, galbe, arc, arche, arcade comme des dessins d’enfants entre un soleil tout jaune et de l’herbe toute verte. À l’étage du dessous, on n’y voit plus que goutte, gouttelettes, humidité. L’humidité sans forme celle qui s’adapte à tout, qui accueille, qui recouvre, enveloppe et emmitoufle. Elle dissimule aussi, empêche de voir au loin, les montagnes d’en face, leurs sommets qu’on ne sait plus blancs ou déjà tachetés par les pierres, les buissons, les falaises qui sortent de l’hiver pour reprendre des couleurs, mais d’abord du contraste, au-delà des formes trop douces, des formes de la neige, toujours un peu trop proches de celles des nuages.
Toute la semaine passée, on était en nuages, on n’était pas en froid, dans la modération qu’il faut pour les fragiles, bourgeons à peine éclos pour faire feuilles ou bien fleurs. Du côté des couleurs, fini le jaune uniforme, ça s’étend dans le bleu jusqu’à l’ultraviolet, et les feuilles se déplient, étalent à l’envie, à peine sorties des plis, le glabre ou le duveteux qu’elles auront une fois grandes, comme dans le cognassier tout rempli de peluches.
Du côté animaux, les chevreuils, les chamois descendent des forêts jusque dans les ouverts pour gouter les jeunes pousses, les herbes, les bourgeons quand la forêt, plus sage, attend encore un peu avant de passer au vert. Pour l’espace sonore, c’est toujours les oiseaux qui prennent toute la place et du côté de la vue un lézard timide qui vient prendre le chaud au coin d’une éclaircie. Mais par cette météo, même les comptines savent bien qu’il pleut, il mouille rimera avec grenouille et autres batraciens. Alors toujours guetter, pour ne pas les bousculer, les points jaunes sur peau noire des jolies salamandres. Mais de la semaine restera surtout le doux, le flou des nuages qu’on fête ce samedi vingt-neuf mars. Alors les yeux au ciel, une pensée pour Stieglitz et ses photos de nuages prises dans les années vingt et les années d’après. Parce que les nuages, eh bien, on y prend goût !


