Carnets de « Voyage en Irréel » #6

Il était une fois... Dans cette série "carnets", toute l'histoire de "Voyage en Irréel", livre écrit à quatre mains avec Nicolas-Orillard-Demaire. Depuis avant l'idée jusqu'à après l'objet !

Le travail sur les images

Jusqu’à maintenant, dans ces carnets, je n’ai quasiment parlé que d’écriture. Facile, c’est moi qui écris les textes et qui écris également ces réflexions sur le livre. Trop facile. Ne parler que de l’écriture, c’est occulter la moitié du travail. Les images, c’est la partie de Nicolas et pour parler d’images, il faudrait donc que je me mette dans sa peau. Facile, me direz-vous ici aussi, puisqu’il est plus grand que moi. Mais justement, une fois que je me serais mise dans sa peau, il resterait plein de place, plein de vides, des façons de voir, de ressentir et de travailler, des envies, des connaissances, des habitudes de travail, des références, …

 Donc je lui ai posé des questions. Et il a répondu.

– Quels sont tes critères pour retenir une image ou non ? 

Pour ce livre, le critère numéro un était « l’irréel ». Il fallait que le lecteur/spectateur puisse se perdre, ne pas identifier, ne pas savoir où il se trouve. 

La perte de repère était d’importance dans le choix des images.

L’autre critère était le coté paysage. Mettre des animaux aurait apporté trop de réalité, de palpable.

Il fallait aussi que ça puisse te parler à toi, parce que sans tes textes, pas de livre. Pas de collaboration, cela aurait été contreproductif.

D’ailleurs ça a marché, puisque certaines images m’ont donné trop d’idées : j’ai parfois écrit plusieurs textes pour une même photo, jusqu’à cinq textes complètement différents, sans parler des versions successives, puisque tous les textes ont évolué, parfois énormément, avec en tête, chez moi aussi, essayer que ça puisse te parler et être compatible avec ton univers.  

– Qu’est-ce que tu utilises pour retoucher/développer ?

Le développement s’effectue exclusivement avec Lightroom.

C’est une habitude de travail depuis mes débuts en photographie. Ce programme me sert aussi bien pour développer que pour classer/ranger l’ensemble de mes photographies depuis plus de dix ans.

Dans livre il y a une image en noir et blanc. Quand tu passes des images en noir et blanc, dans quel but le fais-tu ?

Pour commencer, une image en noir et blanc, ça se réfléchi dès la prise de vue. Transformer une image couleur en noir et blanc sans y penser préalablement, c’est une erreur en soi.

Le graphisme, la matière, les formes et les contrastes sont très importants dans le noir et blanc, il est logique d’y penser déjà sur la scène en couleurs …

Dans le livre il y a aussi bien des images de détails que des vues avec un angle beaucoup plus large. Comment choisis-tu la focale que tu vas utiliser et quel effet souhaites-tu obtenir dans chacun des cas (grand angle ou télé) ?

C’est un choix de l’instant, comme il y a peu de recadrage, la focale va être déterminée par l’endroit du paysage que mon œil veut mettre en valeur. Il s’agit parfois d’un sujet lointain qui nécessitera un 500mm ou un plan très large au 16. La grande focale permet souvent d’éliminer tout contexte là où le grand angle permettra au spectateur de trouver son chemin dans l’image.

Et la pose longue, pourquoi, comment ? Qu’est-ce que ça apporte à l’image ?

La pose longue c’est un paradoxe de photographe de Nature. 

On montre une réalité que les yeux ne peuvent voir. C’est une technique particulièrement adaptée au thème…

– Une réalité que les yeux ne peuvent voir, c’est à dire ?

La pose longue est une technique qui prend une photographie dans un temps donné qui peut être …très long.

La lumière entrante créée alors une moyenne sur tous les éléments en mouvements (l’eau, les nuages, les branches…) retranscrivant à l’image des choses que l’œil seul ne pourrait voir sur place.

– En quoi consiste le développement, quels paramètres tu changes et lesquels tu te refuses à toucher ? 

Le développement c’est vaste. 

Si certaines photographies ne nécessitent quasiment rien, d’autres en revanche sont le fruit d’une grosse réflexion, d’un travail artistique parfois, d’une recherche.

Sans rentrer dans les détails techniques, j’essaie dans l’absolu de me rapprocher de ce que mes yeux ont vu, ou ont voulu voir. 

Je ne change pas les couleurs et n’enlève ni ne rajoute rien aux images. 

Pour les paysages, je recarde le moins possible. Il y a des exceptions mais dans la majorité des cas, c’est la prise de vue d’origine et non un recadrage.

– Quel est ton objectif quand tu développes, dans quel but ?

Me rapprocher de ce que j’ai vu.

Approcher aussi ma vision artistique de ce moment.

– Quels sont tes principes de base et dans quel ordre tu fais les choses ?

Aucun.

En réalité certaines images dorment sur mon ordinateur pendant des années même avant d’arriver à maturité dans mon esprit.

Il n’y a pas d’ordre, pas de règle.

La seule règle que je m’applique est de transformer les beautés du monde en souvenirs.

– Quels sont tes critères pour dire que l’image est bonne et que tu arrêtes d’y toucher ? 

Une bonne image à mon sens est une image simple, épurée, lisible au premier regard, et qui suscite l’émotion. 

Sans émotion, il n’y a pas de photographie.

« Sans émotion il n’y a pas de photographie ». Pas mieux pour le mot de la fin !

Rappels :

Pour d’autres images de Nicolas : http://nod-photography.com

Et pour commander le livre « Voyage en Irréel » : https://spoteditions.sumup.link

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